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des traces de pas...sur les nuages
27 juillet 2014

Le Chapitre 7

 

Le Chapitre 7 :

 

Depuis quelques minutes maintenant -mais comme elles lui avaient semblée longues- ils tournaient complices dans le quartier.

Promener son petit compagnon à cette heure était inhabituel mais nécessaire: elle s'inquiétait du lendemain.

Des pas empressés sur le pavé troublaient la fraîcheur du soir.

Un dernier tour des halles et elle remonta vers sa maison.

Après un dîner sommaire, la fatigue la poussa vers son lit.

Auprès d'elle, enroulé sur un petit tapis, le chien déjà prisonnier de ses rêves ânonnait entre ses dents.

 

Le lendemain, au dernier coup de semonce de la vieille horloge, elle sortit. Le chien n'en pouvait plus, il sautait autour de sa laisse.

Après un détour et des coups d’œil au ciel, ils descendirent en longeant le cimetière vers le coeur du village. Des fleurs bleues aux racines emmurées jaillissaient des pierres froides.

Sur la place, les étals et parasols disparaissaient à mesure, mangés par les camionnettes.

Et les derniers papiers effleuraient le sol comme des poissons plats.

Les cagettes s'empilaient en d'étranges sculptures, et leurs enseignes mélangées appelaient à des voyages intérieurs.

P1070424

 

C'est alors qu'elle les vit : les glaneuses.

Figurantes dans ce décor disloqué, elles étaient aussi vielles qu'elles, pour la plupart bien mises et leurs coiffures tenaient tête au vent.

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Son chien l'attira plus près. De ces visages aux joues hachurées, elle vit alors les chaussures usées, et les cabas rongés dans les coins, alors que les mains vives et expertes s'activaient au sol. La besogne achevée, elles devinrent silhouettes et s'éloignèrent bras chargés.

Avant que n'arrivent les camions verts qui viendraient effacer le tableau, elle fit le tour de la place et se pencha -l'air de rien- sur les cagettes éventrées.

Elle ramassa trois pommes qu'elle fit sentir à son chien et déposa au fond de ses grandes poches, puis, farfouillant encore, elle sauva deux pêches blessées et un citron encore vert.

De nouveau, avec un sourire forcé elle invita le chien à prendre part au jeu. Et le fit sentir.

Ravi, il tira la langue puis pris le citron entre ses crocs.

Feignant de se laisser emporter par ce chien qui l'avait conduite là, elle pressa le pas. Ils firent quelques méandres le temps que la honte se dissipe. Voilà, ils étaient arrivés.

Quelle aubaine ce marché.

Elle ouvrit la porte, libéra le chien, lui frictionna l'encolure et déposa les fruits et l'agrume dans un saladier Pyrex.

Elle allait se laver les mains quand retentit la sonnette. Le chien, assis, mit l'oreille en coin.

Elle n'attendait rien n in personne, ce n'était pas l'heure du facteur, avait elle été vue ?

« Je n'ai rien volé « pensa t elle, un souffle froid traversant sa poitrine.

Elle se déchaussa pour approcher de l’œilleton, mais n'y vit que les contours bombés de la rue.

Elle compta dix avec l'horloge, puis ouvrit.

Aucun diable ne lui sauta au visage.

A ses pieds sur le paillasson était posé un paquet, sans adresse. Le papier kraft commençait à se couvrir de fines taches de cette pluie odorante qui ne durerait pas.

Elle prit le colis et sur la table de la cuisine, dans un carré de lumière, elle l' ouvrit.

Il y avait là une toile de trente centimètres de côté et deux fagots de papier ligotés avec de la ficelle bon marché.

Quand elle défit le premier lien, une ribambelle de pinceaux de toute taille roulèrent sur la table, fins, touffus, biseautés ou en éventail. Ils étaient propres mais d'une usure certaine.

Coupant la deuxième ficelle, elle recueillit dans ses mains des tubes de peinture, tâchés et cabossés

Le tout sur la table prenait une place considérable. Elle fit un cercle de ses bras et rassembla ces joyaux.

Un petit rouleau s'échappa alors du châssis de la toile, trois billets tombèrent au sol ainsi qu'un papier plié en quatre. Ces consonnes aux fines et longues élytres, ces 0 comme des bouches, l'inclinaison légère d'une bise.

« Comme j'aimerais revoir la couleur se fondre dans tes mains et vivre  de nouveau dans ton regard  »

 

Elle posa la toile à plat. Mais cela n'allait pas. Elle la posa sur des livres empilés sur une chaise et prépara ses couleurs sur un carton.

Bientôt les poils des pinceaux se mirent à frissonner .

Que c'était drôle, il suffisait de » regarder devant et se laisser aller.

Face à la fenêtre naquit un pommier aux branches duquel un fil faisait danser des vêtements. A son pied une paire de botte attendait que quelqu'un apparaissent derrière les collines. Des vaches allaient brouter plus loin. Devant le paysage elle dessina l'encadrement d'une porte, des patères sur la gauche.

 

Elle imagina les lignes d'un vêtement, une chemise à carreaux.

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Une odeur d'huile de lin s'échappait vers la rue.

Le tableau prit corps, il pouvait sécher là devant la fenêtre.

 

Heureuse et lasse, le dos douloureux, elle s'assit et ferma les yeux.

Un petit déplacement d'air aussi léger qu'une ombre amena à ses lèvres un sourire inespéré. Merci.

Il se pencha au dessus d'elle et entoura ses hanches de ses mains, puis elles glissèrent sur ses côtes pour remonter comme deux chaloupes qui s'accrochèrent à ses seins.

Il frotta sa joue rugueuse à la sienne

Dans sa chemise ouverte, il regardait l’œuvre.

Elle le respira longuement, le revenant.

Il était temps de fermer la fenêtre.

 

 

.

 

.

Une demoiselle aux ailes vertes translucides était posée sur la branche qui caressait mon épaule.

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Comme le papier d'un bonbon, le vent la porta un instant, puis elle battit des ailes et s'éleva alors que je replaçai le marque page.

 

 

 

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