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des traces de pas...sur les nuages
2 septembre 2013

Le point de retour

Le point de retour

 

 

Je décidai de faire une halte au Bar des Sports, mes pensées ricochaient à n'en plus finir.

  Prendre un café.

  Sur une péninsule, face à l'église, impossible de le manquer: à sa gauche, la rue de la mairie, à sa droite celle du stade.

  Pas de gling gling, juste le frottement du pêne . Je ne savais pas être poli, ni dire bonjour au moment opportun.

    A mon entrée, trois têtes fixées à trois coudes se dévissèrent en choeur, mêmes visages fondus de cousins d'alcool.

  Silence.

  Râclements de gorge ou de chaise.

  Les autres clients semblaient des pions sur une partie ratée de solitaire.

  Je m'installai sur une banquette noire, vue panoramique.

      Le patron fit son entrée par une porte latérale et me salua du sourcil puis me fit "café "du menton. Et écarta le pouce et l'index d'une hauteur de   tasse. Le geste minimal potentialisé.

    Derrière le comptoir, il n'était pas seul. De mon observatoire, je pouvais voir le sommet d'une tête brune, elle apparaissait, disparaissait, glissant   derrière le percolateur.

    Sans qu'il ne prononce une syllabe, elle mit la tasse sur une soucoupe posée à hauteur de ses yeux foncés, tendit le bras droit pour ajouter une cuillère puis le gauche, plus haut, pour la noisette enrobée (j'entendis le froissement du papier).

    Elle sortit de sa cachette.

    Quelque chose différait semblait il.

    Ses bras et jambes, fins comme des pailles, partaient d'un point unique et elle avançait, nez en l'air, soufflant sur des cheveux afin qu'ils découvrent son visage. Ses vêtements tombaient droit comme de lourds rideaux.

    La moitié de son corps était pris dans un corset orthopédique, une carapace de plastique sommée de dompter sa colonne.

    De cette rigidité découlait une grâce, un mantien forcé, mais on devinait les étincelles qui crépitaient au bout de ses doigts.

    Elle évoluait au milieu des pieds et coins divers, visant à chaque pas, telle une funambule, le centre d'une trajectoire déjà assimilée.    

    J'aurais pu suivre avec une règle ses pas de A à B à C.

    Elle ne frôlait rien, échappant à tout cela par des fils invisibles.

P1050182

    S'endormait elle le soir telle une poupée de chiffon?

    Elle avait la moitié de mon âge et l'enfant que je fus se tassait à son approche.

    Moi aussi je contractais mes orteils d'un coup face aux étrangers, et carressais l'ongle de mon pouce avec l'index.

    Qu'avait donc changé ces années? Pas grand chose et tant à la fois. J'avais envie de le lui dire, mais voyant la petite fenêtre dans son regard je sus qu'elle l'avait déjà compris.

    Au milieu du brouhaha et des angles ternes et brisés, elle était comme la couleur d'un tableau. 

P1050511

 

 

 

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